
Chimiothérapie cytotoxique conventionnelle
Les débuts de la chimiothérapie datent de l’Antiquité, durant laquelle les effets favorables de l’extrait de podophyllum sur les cancers cutanés avaient été découverts. Au siècle dernier on utilisait les dérivés arsenicaux contre la leucémie myéloïde chronique. Cependant, ce n’est que vers 1940 que la chimiothérapie moderne a pris son essor avec l’utilisation de dérivés azotés de l’ypérite suivie des premières applications cliniques.
Principe
La chimiothérapie a pour but de ralentir la croissance tumorale en inhibant la synthèse protéique ou en bloquant la division cellulaire.
La molécule idéale aurait une affinité sélective et exclusive pour la tumeur limitant ainsi les effets secondaires de la chimiothérapie.
En effet, l’activité cytotoxique s’exerce non seulement sur les tissus tumoraux mais également sur les tissus sains du patient entrainant ainsi les effets indésirables qui suivent une cure de chimiothérapie.
L’effet sur les cellules saines est d’autant plus important que ces cellules ont une activité métabolique et cinétique intense. Plus le tissu a un coefficient de renouvellement cellulaire élevé, plus il est sensible à l’action des toxiques.
Les tissus hématopoïétiques se renouvelant rapidement, ils sont très sensibles à la toxicité de la chimiothérapie, ce qui entraine :
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une anémie,
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lymphopénie, et
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thrombocytopénie
Et donc un risque hémorragique et infectieux augmenté pour le patient.
L’épithélium du tube digestif est également sensible ce qui entraîne un série de manifestations digestives pour le patient.
L’alopécie (perte des cheveux) et la disparition des cellules de la lignée germinale (spermatozoïdes et ovules) dont résulte une infertilité sont aussi causées par ce mécanisme.
La chimiothérapie a pour avantage par rapport à la chirurgie et à la radiothérapie d’avoir une action sur l’ensemble de l’organisme. Elle est administrée par voie intraveineuse la plupart du temps mais peut aussi l’être par voir orale, intra-musculaire ou sous-cutanée.
La chimiothérapie peut être administrée à différents moments du traitement anticancéreux, on parle ainsi de :
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Chimiothérapie d’induction, primaire ou néo-adjuvante (induction de la rémission, du traitement) : Elle est administrée d’emblée lors de la découverte de la maladie pour une phase évolutive initiale ou lors d’une rechute. La cure sera énergique afin d’obtenir la rémission la plus complète possible. Le but étant d’obtenir la stérilisation des micro-foyers métastatiques. Elle est administrée pour les maladies à fort potentiel évolutif pour lesquelles le risque métastatique est au premier plan. Elle permet de rendre ces tumeurs accessibles aux traitements locorégionaux (chirurgie et radiothérapie).
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Chimiothérapie adjuvante : Après l’induction et la réalisation de la chirurgie ou radiothérapie (traitements locorégionaux) pour stabiliser le traitement. Elle est destinée à traiter une maladie résiduelle qui peut exister sous forme de micro-métastases. Elle précède l’arrêt du traitement ou le relais par une immunothérapie.
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Chimiothérapie palliative : Elle a pour but de ralentir les formes avancées, récurrentes ou métastatiques inaccessibles aux traitements locorégionaux (chirurgie et radiothérapie).
Indications
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Seule, la chimiothérapie est indiquée pour réduire le volume de la tumeur primitive et pour s’attaques aux cellules cancéreuses disséminées dans l’organisme. C’est également la seule arme thérapeutique face aux cancers sanguins (leucémies).
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En association avec la radiothérapie : la chimiothérapie peut être utilisée avant la radiothérapie elle va permettre de réduire le volume de la tumeur et d’irradier le moins possible et si elle est utilisée après elle permet d’agir sur d’éventuelles métastases encore indétectables. Elles peuvent aussi être utilisées en même temps ou dans deux temps différents. Elles sont utilisées ensemble par exemple pour certains cancers bronchiques ou du col de l’utérus.
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Chirurgie et chimiothérapie : Si la tumeur primitive a une taille trop importante pour en faire l’exérèse chirurgicale, il est possible la rendre réséquable en pratiquant un traitement d’induction à savoir une chimiothérapie d’induction afin de pouvoir par la suite faire l’exérèse chirurgicale de la tumeur. De même, la chimiothérapie peut être utilisée après la chirurgie pour éliminer d’éventuelles cellules cancéreuses disséminées dans l’organisme, par exemple lors de mélanomes cutanés.
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Chirurgie, et radio-chimiothérapie : utilisées notamment dans le cas de cancers de la sphère ORL.
Principales molécules
La classification des molécules de chimiothérapie se fait principalement en fonction de leur mode d’action.
On retrouve :
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Les antimétabolites : Ils empêchent la synthèse des bases puriques (adénine et guanine) et pyrimidiques (thymine, uracile, cytosine) constitutives de l’ADN ou empêchent l’incorporation de celles-ci par les polymérases (enzymes permettant la synthèse d’ADN) lors de la multiplication cellulaire.
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Les agents alkylants : Souvent d’origine synthétique, ils agissent principalement sur l’ADN par mécanisme ionique et empêchent la duplication normale de l’ADN précédant la division cellulaire. Dans ce groupe nous distinguons 4 sous-groupes :
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Les moutardes azotées ou chloréthylamines
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Les éthylènes imines
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Les esters sulfoniques
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Les époxydes
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Il existe d’autres molécules pouvant être rattachées au groupe des agents alkylants :
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Les nitroso-urée
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Organoplatines
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Extraits de certains micro-organismes
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Les anti-topo-isomérases : Ce sont des agents souvent d’origine naturelle (isolés à partir de souches bactériennes) qui s’intercalent entre les paires de bases de l’ADN provoquant des coupures non réparables et empêchant la synthèse de l’ADN lors de la division cellulaire. Dans cette famille de molécule on retrouve également des composés semi-synthétiques qui inhibent la topo-isomérase I ou II.
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Les anti-fusoriaux : souvent d’origine végétale, ils inhibent la division cellulaire après la réplication du matériel nucléaire (métaphase) par altération du système micro tubulaire permettant la bonne répartition des chromosomes sur le plan équatorial de la cellule puis leur répartition dans les cellules filles et en empêchant la plasmodiérèse.
Principales toxicités de la chimiothérapie
Les effets de la chimiothérapie au niveau buccal apparaissent en général très rapidement après le début de la cure. La chimiothérapie a des effets sur les cellules à renouvellement rapide, telles que les cellules de la moelle osseuse ou des cheveux.
Cette toxicité peut s’expliquer par deux voies :
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Une toxicité directe vis-à-vis de la muqueuse buccale : la chimiothérapie en traîne par exemple des mucites et des stomatites susceptibles de se surinfecter. Les molécules causant le plus fréquemment des mucites sont :
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Les anti-métabolites : Méthotrexate (+++), Fluorouracile, Pentostatine
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Les antibiotiques : Doxorubicine, Dactinomycine, Mitomycine
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Topotécan
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D’autres exemples de cette toxicité directe sont :
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Des manifestations digestives :
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diarrhées,
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mucites,
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manifestations hépatiques,
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nausées,
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vomissements,
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Manifestations rénales :
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Modifications de l’urémie, de la créatinémie
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Modifications de la protéinurie
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Hématurie
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La perte des cheveux (alopécie)
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Manifestations cutanées :
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syndrome mains-pieds
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vésicules
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prurit
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dermatites exfoliatives
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désquamation…
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Réactions allergiques
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Neurotoxicité ( douleurs, effets centraux et périphériques)
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Manifestations cardiaques
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Une toxicité indirecte par atteinte du tissu hématopoïétique entrainant une leucopénie, une thrombopénie et une anémie. La leucopénie favorise la survenue d’infections bactériennes, virales ou fongiques. La thrombopénie est la cause d’hémorragies car elle empêche l’hémostase primaire. L’anémie est responsable d’atrophie de la muqueuse buccale.